FAQ

Pour commencer, pouvez-vous nous expliquer votre métier et ce qui le différencie de l’esthétisme traditionnel ?

Contrairement à une esthéticienne traditionnelle, la socio-esthéticienne prend en soin des personnes qui ne possèdent pas toute leur mobilité physique ou bien toutes leurs capacités cognitives. Mon expérience précédente est un véritable avantage car c’est un public que j’avais l’habitude de côtoyer. Faire un transfert d’un résident d’un fauteuil à une table de massage est un geste que
j’avais l’habitude de pratiquer.

Quelles ont été les raisons de votre engagement en tant que socio-esthéticienne ?

Il y a deux raisons à ce changement. Professionnellement, j’ai toujours été dans le bien-être des résidents. Au sein de la résidence Saint-Vincentde-Paul, j’avais même créé un atelier relaxation pour le bien-être pour les résidents afin de ne pas m’arrêter aux soins de nursing que j’effectuais quotidiennement. C’était déjà quelque chose que j’avais en moi : prendre soin mais d’une manière un
peu différente. Je voulais casser ce côté soignant/ soigné pour montrer que nous ne sommes pas là que pour faire la toilette des résidents ou leur donner à manger. La création de l’institut bien-être au sein de la résidence a vraiment été une aubaine pour pouvoir accéder à ce poste.

Comment le socio-esthétisme contribue-t-il à améliorer le quotidien des personnes en situation de dépendance ?

La volonté de la directrice au départ du projet a été de créer une bulle de bien-être pour les résidents. Par exemple, le fait que l’institut ne soit pas dans le même bâtiment que l’Ehpad cela permet
aux résidents de changer d’environnement et cela aide les résidents à ne plus se sentir dans l’Ehpad mais d’avoir l’impression d’être comme une personne lambda qui se rend dans un institut pour
prendre soin de soi.

Quels bienfaits constatez-vous sur les résidents ?

En fait, maintenant j’ai identifié deux types de résident : il y a les résidents qui viennent vraiment pour le côté bien-être. Ce sont les résidents qui viennent pour faire un soin visage, une manucure ou une épilation. Et puis, il y a ceux qui viennent pour soulager leurs douleurs chroniques. Ceux-là vont venir pour un massage, pour profiter du matelas hydrojet ou une séance de réflexologie. Pour moi, c’est important de faire cette différence car cela fait partie des raisons pour lesquelles ils viennent.
Pour ceux qui viennent pour soulager leurs douleurs, depuis peu nous avons mis en place les échelles de douleur. C’est-à-dire que je quantifie leur douleur au début de la séance et une nouvelle fois en fin de séance. Je prends également en compte l’effet placebo car je pense que cette donnée ne doit pas être mise de côté. En effet, si le résident se sent mieux simplement par
le fait qu’il sait qu’il va venir à l’institut, je trouve cela important de le préciser.
Pour ceux qui viennent plus spécialement pour le bienêtre, on constate de la relaxation, de la détente, une diminution de stress mais aussi une meilleure estime de soi.

De quelle façon faites-vous le lien entre les autres professionnels de l’Ehpad ?

Pour quantifier la douleur, je travaille beaucoup avec le médecin coordonnateur et la cadre de santé pour justement quantifier la douleur. Nous travaillons ensemble par exemple pour quantifier la douleur des résidents qui se rendent à l’institut. Par exemple, nous utilisons l’échelle ECPA qui est l’Echelle Comportementale d’Evaluation de la douleur chez la Personne Agée non communicante. Nous utilisons aussi une échelle EVA (Echelle Visuelle Analogique) qui une échelle numérique sur laquelle le résident place un curseur entre 0 et 10. Ensuite, il y a un vrai travail collaboratif qui est fait
avec l’ensemble de l’équipe. Effectivement, je travaille aussi bien avec le médecin coordonnateur, que la cadre de santé, mais aussi avec les infirmières, les aides-soignantes en passant aussi par l’animatrice. Pour les résidents qui ne sont pas en capacité de prendre rendez-vous eux-mêmes, je fais appel soit aux équipes soignantes, soit aux animatrices qui ont une vision différente de la mienne car elles côtoient davantage les résidents au quotidien. En échangeant ensemble, je vais pouvoir ensuite choisir le soin qui est le plus adapté au résident.

Comment se déroule une séance de soins ?

Je fais entre 5 et 6 soins par jour. Je fais des créneaux d’une heure par résident. Concrètement il y a des soins qui me prennent moins d’une heure mais en venant me voir le résident sait qu’il a une heure qui lui est complètement dédiée et durant laquelle on ne va prendre soin que de lui !

Ce métier semble se développer de plus en plus, comment l’expliquez-vous selon vous ?

Je pense qu’au niveau des Ehpad il y a une certaine vulgarisation des soins qu’on apportait aux résidents. Certains pensaient que les aides-soignantes par exemple ne sont là que pour faire manger les résidents, faire leur toilette comme des robots. Depuis le Covid, je remarque que les gens ont encore plus besoin de prendre soin d’eux. Le Covid a fait du mal à beaucoup de monde, on s’est rendu compte que notre quotidien pouvait être bouleversé du jour au lendemain sans que nous puissions faire quoi que ce soit. Je pense que cela nous a permis de nous rendre compte que nous ne prenions pas suffisamment soin de nous. Lorsque j’ai commencé mon travail à l’institut, je ne m’attendais pas à ce que cela plaise autant. Vous savez les personnes âgées qui sont là n’ont jamais connu ça, concrètement certains ont connu la guerre, ils n’ont jamais été dans le « prendre du temps pour soi », c’est générationnel. Ce n’est pas du tout une génération qui a l’habitude de prendre soin d’elle. C’est très gratifiant pour moi au quotidien de pouvoir leur donner et leur procurer du bien-être. Je n’ai pas l’impression de venir travailler ! Tout ce que je donne pendant les soins, je le reçois fois mille ! Lorsqu’un résident repart avec un sourire où en me disant qu’il va un peu mieux ou qu’il est pressé de revenir à l’institut c’est tout l’or du monde. J’ai l’impression de transpirer la joie.

Lorsque j’étais aide-soignante je me battais chaque jour contre le temps. Chaque jour, je savais que j’avais un certain nombre de résidents à prendre en soin avec des horaires à respecter ce qui était bien normal. Mais depuis que je travaille à l’institut je n’ai plus de montre au poignet, c’est comme si le temps s’arrêtait !

L’institut est également ouvert aux professionnels sur le temps de pause, est-ce que beaucoup d’entre eux arrivent à en profiter ?

Tout à fait, j’ai une vingtaine de salariés qui viennent chaque mois à l’institut. Chaque salarié en CDI a droit à un soin gratuit par mois. Les salariées constatent que dans leur quotidien elles n’ont pas forcément le temps de prendre soin d’elles et le fait d’avoir cet institut sur leur lieu de travail eh bien elles prennent le temps de s’occuper d’elles ! En terme de qualité de vie au travail c’est un sacré avantage.